Le Forum des Droits sur l’Internet (ou encore FDI) est un organisme ayant profondément influencé et façonné les usages de l’internet à une période charnière du développement du web. Créé en 2001 sous l’impulsion du gouvernement et rattaché au ministère de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi, le FDI a joué le rôle de médiateur et de précurseur du droit appliqué au numérique jusqu’en 2010. A la fois subventionné par des fonds privés et publics, c’est le retrait du soutien financier de l’Etat qui conduira à sa dissolution en 2010.
Une structure adaptée au contexte
Le début des années 2000 voit l’explosion de la bulle internet, bulle spéculative liée au secteur de l’informatique et des télécommunications. Ceci marque l’entrée dans l’ère numérique qui n’a cessé de croître exponentiellement d’année en année. Le développement frénétique de ce domaine, véritable fracture générationnelle responsable en grande partie du changement profond des habitudes de consommation, se devait d’être encadré rapidement et efficacement. C’est dans cette optique qu’a été créé le Forum des Droits sur l’Internet, dont l’un des objectifs principaux a été de façonner une régulation de l’Internet qui soit à la fois la plus efficace et la plus légitime possible. Cela signifie entre autres la mise en place d’outils de concertation de l’ensemble des acteurs du numérique de manière à développer des normes et pratiques en adéquation avec les besoins et contraintes d’Internet. Cette implication de tous les acteurs nécessitait un travail structurel important de la part du FDI.
En a résulté un organisme prenant la forme d’une association, lui offrant ainsi la souplesse et l’ouverture nécessaires à l’instauration du dialogue entre tous les acteurs, en vue d’aboutir à la résolution de questions complexes. Afin que l’ensemble du panel des acteurs soit représenté et puisse participer aux débats de manière égale, il a fallu de plus faire du Forum des Droits sur l’Internet un service d’intérêt général. Cela nécessitait une transparence absolue des procédures internes, associée à l’importance d’un financement public fort (ce qui explique la dissolution du FDI à la suite du retrait de ce financement). Un tel travail d’impartialité et de transparence a rendu possible la représentation égale des acteurs du marché, qu’ils soient marchands ou non.
De plus, cet organisme devait se hisser en tant qu’expert incontestable de tous les sujets abordés. Pour cela, il a été notamment mis en place un système de collaborateurs permanents. Ainsi, le travail structurel alliant souplesse, impartialité, intervention de tous les acteurs et présence de collaborateurs permanents, a permis au FDI de développer une expertise transversale de l’ensemble des sujets liés à Internet : sujets de société, socio-économiques, de prospective ou encore techniques. Le Forum des Droits sur l’Internet s’est ainsi rendu presque indispensable, et son expertise a été de nombreuses fois sollicitée par les pouvoirs publics et par des acteurs privés.
Des missions diverses et complexes
Le chantier sur lequel s’est lancé le Forum des Droits sur l’Internet était à la fois nouveau et très complexe. Afin de cadrer correctement son champ d’application, le FDI a défini des missions précises. Dans un premier temps, il s’agissait principalement de développer des outils de concertation des acteurs du numérique sur des sujets de droit et de société. Cela allait de pair avec un travail de veille juridique et technologique, ainsi que la volonté d’informer et de sensibiliser le public aux enjeux de l’Internet. Ces démarches aboutissaient souvent à la formulation de recommandations auprès des autorités publiques et des acteurs de l’Internet.
Dans un second temps, avec plus de recul et d’expérience sur les attentes du public et les enjeux du numérique, d’autres missions se sont greffées au FDI. En effet, il ressortait du travail du Forum qu’il était difficile de concilier le droit existant avec la multitude et la nouveauté des utilisations du numérique. L’association a donc décidé de se placer à mi-chemin entre le droit et le soft law. Cela a notamment conduit à l’élaboration de chartes et de labels, ainsi qu’à la création d’un système de résolution en ligne de différends sur des sujets liés au net.
Ces lignes directrices regroupent un grand nombre de réalisations de la part du FDI, qui ont permis de façonner le numérique tel qu’on le connaît aujourd’hui. Citons entre autres une participation active à tout ce qui a touché au développement démocratique du commerce électronique ainsi qu’à la popularisation de la e-démocratie (à l’instar des campagnes électorales en ligne). Dans le domaine des jeux vidéo, le travail du Forum du Droit sur l’Internet a eu un retentissement international, en convaincant les gouvernements d’adopter PEGI, le dispositif de classification par catégorie d’âge des logiciels de loisirs, désormais généralisé à l’échelle mondiale. Cela s’est inscrit dans une démarche plus générale de protection de l’enfance face aux dangers du numérique.
Ainsi, le travail du Forum des Droits sur l’Internet a eu une influence considérable sur le développement de l’Internet. Cela a été rendu possible par des efforts de fond et de forme sur cet organisme, dont les travaux se sont inscrits dans un contexte nouveau et complexe. Cependant, avec le rapide développement du numérique, les enjeux de régulation de l’Internet ont eux aussi rapidement et radicalement changé. La difficulté d’adaptation à une évolution telle, ainsi que la disparition des subventionnements publics, ont conduit le FDI à décider de sa propre dissolution le 7 décembre 2010.
source : https://www.echosdunet.net/dossiers/forum-droits-sur-internet